1989 : Le rapport Steg sur les urgences, présenté au Conseil Économique et Social souligne le succès des (nouveaux) services mais en pointe « l’accueil défectueux », « des attentes excessives aux allures kafkaïennes », « un manque d’explications et d’apaisement pour les malades », « un déficit de médecins et d’infirmières qualifiées »
2003 : « Les personnels soignants dénoncent la montée inexorable de la charge en soins, le manque d’effectifs, les cadences élevées et la déshumanisation de leur travail. » (Rapport d’information sur l’organisation interne de l’hôpital, présenté par M. Couanau, député)
2019 : Le quotidien Libération du 14 novembre constate qu’à l’hôpital « l’épuisement des personnels soignants comme des médecins a entrainé une hémorragie des professionnels lassés d’être maltraités » et reprend l’antienne d’une infirmière coordinatrice du Collectif « Inter-Urgences » : « Nous estimons à 3,8 milliards d’euros le surcroit de crédits nouveaux qu’il faut débloquer pour satisfaire nos revendications. »
On pourrait sans doute remonter plus loin encore le refrain des constats alarmistes sur l’hôpital malgré leur traitement itératif à base des mêmes « investissements massifs ». Seuls changent la sémantique et le levier financier : cette fois-ci, ce sera peut-être le relèvement de l’ONDAM hospitalier, après le relèvement des tarifs journaliers, après le budget global, après la T2A ; voire l’effacement de la dette des établissements.
Refrain désespérant. Sauf que cette fois est sans doute la dernière chance de réformer enfin l’architecture vermoulue de l’hôpital public ; son financement avantageux, sa productivité en berne, son management dépassé.
Et si on commençait par le commencement : définir enfin sa vraie mission et les moyens nécessaires à son adaptation. Il est à craindre que dans sa précipitation à éteindre l’incendie – entre le conflit attendu dans les transports et l’acuité du problème des retraites – Emmanuel Macron ne sacrifie l’urgence de la réforme à la dictature de la rue.
Docteur Jean-Pierre BINON
Président du Syndicat National des Cardiologues
